Tarifs 2024 de mutuelle et de prévoyance : ça va faire mal !
On a l’impression chaque année que rien ne freine la hausse des tarifs. Comment les assureurs justifient-ils les augmentations de 2024, qui battent tous les records ?
Laurent Moutou : il y a eu une explosion des dépenses, tout simplement. Les arrêts de travail ont été plus nombreux et plus longs, y compris chez les cadres et les jeunes de 18 à 24 ans qui d’habitude, n’étaient pas concernés. En santé, il y a eu un rattrapage très fort pour tout ce qui était reporté pendant la période Covid : opérations non urgentes, prothèses dentaires, changement de lunettes… Les remboursements des mutuelles ont augmenté de 20, voire 30% sur certains postes (dentaire, audioprothèses), et les assureurs remontent leurs tarifs pour rentrer dans leurs frais.
Mais si on se soignait moins pendant le Covid, pourquoi n’ont-ils pas baissé ces tarifs à l’époque ?
Parce que l’essentiel de ce qu’ils avaient économisé leur a été ponctionné par l’État. Ils ont versé au total 2,3 milliards de taxe exceptionnelle Covid entre 2021 et 2022. Rappelons aussi que les contrats de mutuelle supportent presque 14% de taxes.
Malgré tout, comment arrive-t-on à ces hausses de plus de 10% pour les mutuelles ?
Les assureurs prévoient des majorations de tarifs de 5 à 7%. Mais ces tarifs sont indexés sur le Plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS*), qui va augmenter de 5,4% au 1er janvier 2024 pour compenser l’inflation. Additionnez ces deux chiffres et vous avez la réponse.
Par le passé, les assureurs avaient des contrats déficitaires et d’autres excédentaires ; le système s’équilibrait. Mais comme il n’existe quasiment plus de contrats excédentaires, la majoration des tarifs est le seul moyen ne pas être dans le rouge.
Comment aidez-vous vos clients à limiter la casse ?
Pour la mutuelle comme pour la prévoyance, nous pouvons réaliser une mission de courtage, c’est-à-dire chercher une autre compagnie dont les tarifs seraient plus attractifs. Mais toutes supportent les mêmes dépenses, et l’économie éventuelle sera modérée.
L’autre possibilité, c’est de regarder de près les garanties de ses contrats pour voir dans quelle mesure elles peuvent être ajustées. C’est difficile si votre profession est régie par une convention collective qui fixe des conditions minimales de protection sociale, par exemple les salariés des pharmacies. Mais dans d’autres métiers, vous disposez de marges de manœuvre.
Réduire les garanties, c’est pénaliser ses collaborateurs ?
Non, ce n’est pas du tout l’esprit. L’idée, c’est d’analyser la consommation médicale de l’entreprise pour relever de possibles anomalies. Pour le dentaire par exemple, j’ai parfois découvert que 80% des dépenses étaient réalisées par 10% de l’effectif ! Pour mettre fin à ces abus, nous avons limité le nombre de de prothèses dentaires par an ou plafonné les montants de remboursements par an et par bénéficiaires, sans que la majorité des collaborateurs se sentent lésés, et le tarif de la mutuelle a baissé.
Autre piste possible, proposer des contrats à deux étages : le premier collectif et obligatoire avec de bonnes garanties de base pour tous, le second facultatif et individuel pour les salariés qui souhaitent renforcer certains postes, par exemple selon la composition de leur famille.
En somme, rien n’est figé en matière de mutuelle ?
Rien n’est figé en effet, d’autant que vous pouvez résilier à tout moment avec un préavis de seulement un mois (après un an de souscription). De plus, il existe des centaines de contrats aux offres extrêmement variées : on peut faire du sur mesure. Exemples : remplacer une mutuelle à taux unique par des formules solo, duo et famille : décider de ne pas rembourser les médecines douces ou les prendre très bien en charge…
Bien répondre aux besoins de ses collaborateurs est aussi important que d’amortir les hausses de tarifs ; et si on peut concilier les deux, c’est encore mieux.
Et pour la prévoyance, quelles possibilités ?
On peut faire baisser fortement les primes en modifiant les franchises des arrêts de travail, ou certaines garanties accessoires (doublement ou triplement capitaux décès si accident, rentes éducations inutiles,…). Mais en parallèle, il faut agir pour réduire le nombre de ces arrêts : service d’assistance téléphonique pour les collaborateurs en difficulté, accord d’intéressement favorable aux plus assidus…
Attention : les contrats de prévoyance ne sont résiliables qu’une fois par an, en informant l’assureur deux mois avant l’échéance ; pour 2023 et dans la majorité des cas, la date limite est donc le 31 octobre prochain.
Bien que le contexte actuel présente des défis indéniables, il nous sera souvent possible de trouver chez certains de nos partenaires assureurs, une mutuelle santé ou une prévoyance collective abordable en 2024, alliant à la fois une bonne couverture et un bon rapport qualité/prix.
*PASS 2024 : 46 368 € - PMSS 2024 : 3 864 €